Bonsoir la Roue Sportive,
j'a hésité à faire un CR car j'ai bien du mal à digérer mon échec sur une épreuve que je prépare depuis maintenant un an et demie et qui constituait mon grand objectif de cette saison.
Dans les faits, j'aurais pu la terminer car j'étais très très en avance sur la barrière horaire mais plus dans mon objectif des 50h.
Tout cela n'étant finalement qu'une question d'ego.
Au final je signe mon abandon après 962 kms et 33h52 passées sur le vélo, soit une moyenne de 28,4 km/h et 8660m D+.
A noter un temps d'arrets de 8h08.
Soit 42h00 exactement sur et en dehors du vélo, ce qui fait tomber la vitesse à 22,8 km/h.
La cause de mon abandon est que je n'arrivais plus à m'alimenter tant en liquide qu'en solide avec une épouvantable envie de vomir sans y parvenir.
Il ne me restait plus que 253 kms pour terminer l'épreuve mais je ne m'en sentais plus capable, n'ayant que peu de forces dans les jambes et encore près de 3000m de D+ à effectuer.
Je ne souhaitais pas mettre ma santé en danger.
Aujourd'hui je n'ai vraiment aucun regret mais c'est difficile à digérer, sans jeu de mot.
Je n'avais à ce jour jamais vécu un tel souci digestif et je n'ai pas su faire face.
Après réflexion je pense que la cause en est ma vitesse excessive du départ qui conjuguée à la fatigue et très peu d'arrêts ainsi qu'une nutrition pas assez diversifiée m'ont emmené vers cette situation.
Quelques remarques néanmoins sur l'épreuve car j'ai quand même pris un pieds considérable sur l'aller avec de très bonnes sensations et une belle vitesse car j'ai effectué les presque 400 premiers kms à 36 de moyenne car j'etais dans un peloton d'une vingtaine d'unités avec de gros relais.
Mon départ a été donné dimanche 20/08 à 16h30 avec un peloton de 250 cyclistes et rapidement la sélection s'est faite par l'arrière.
J'étais dans la troisième vague et les deux premières avaient respectivement 15 et 30 minutes d'avance sur nous.
Le but n'était pas de les rattraper mais on s'est pris au jeu et j'ai signé à ce moment là, je pense, le début de la fin.
Sur les 200 premiers kms j'avais très très soif et des débuts de crampes donc j'ai beaucoup bu et pourtant il faisait une chaleur raisonnable et je n'ai pissé qu'après 10h d'efforts...
Sur le premier tiers de l'épreuve, à chaque ravito je buvais l'intégralité de mes 2 bidons puis après un peu moins et mes débuts de crampes sont parties à ce moment là.
J'ai pris mon rythme de croisière car les kilomètres défilant nous étions de moins en moins nombreux à repartir des différents points de contrôle et j'ai fini par rouler seul une bonne partie de la première nuit. Malheureusement un peu trop vite mais sans m'en rendre compte.
Les jambes tournaient bien et avec mes 6 kilos perdus sur les dernières semaines, j'étais super bien dans les bosses et Dieu sait qu'elles étaient nombreuses, jamais très longues, en moyenne 1,5 kms mais bien usantes au fur et à mesure.
Au petit matin de la première nuit, passée sans encombre, il y avait un fort brouillard dans la campagne bretonne et mon casque pissait l'eau. Nous nous rapprochions peu à peu de la mi parcours et àu contrôle secret je demande à un pointeur combien de cyclistes sont passés et ce dernier me dit 35. Donc en une nuit j'en avais doublé plus de 450 et seulement 3 m'ont doublés...
Autant dire que j'étais bien trop rapide car quelques heures plus tard je passais à Brest, soit la mi parcours, en 20h12 soit 30,3 de moyenne arrêts compris et 610 kms au GPS.
Mais j'étais euphorique et me disait qu'avec mon entraînement ça allait passer crème....Grosse erreur.
Les ennuis ont débuté peu après car petit à petit j'avais de plus en plus de mal à changer mes pignons, à tel point que j'en avais mal à la main droite.
J'appelle mon frère,quasi en pleure, en lui disant que ça sentait l'abandon car ça n'était plus tenable, j'étais alors à une trentaine de kilomètres du contrôle suivant. Vincent me dit qu'il y a un mécano et que je vais pouvoir réparer.
Je suis fatigué et je vais me reposer une trentaine de minutes au bord de la route.
Nous sommes en milieu d'après-midi, il fait relativement chaud, 28° et je n'ai pratiquement plus rien à boire.
Une voiture arrive en sens inverse, ses occupants ont dû sentir ma détresse car ils s'arrêtent pour me demander si tout va bien.
Ils ont de l'eau et très gentiment ils remplissent mes bidons.
Je repart réconforté. Quelques encablures puis loin, des habitants du village traversé proposent des boissons. Bon sang, ils ont du coca, je m'arrête. Il est certes tiède mais ça fait du bien. Le couple me propose également un morceau de quatre quart que j'accepte volontiers.
Je profite de ce passage pour dire que je n'ai jamais vue une telle ferveur pour une épreuve de vélo en dehors de l'Ardéchoise.
Tout le long du parcours nous avons été encouragés, applaudis, les voitures nous klaxonnaient, les enfants nous tapaient dans les mains.
Même la nuit on nous encourageait. Cette épreuve est mythique et les gens le savent. Une ferveur populaire impressionnante.
Ce sont des souvenirs que je vais garder pendant très longtemps.
Mais revenons à notre épreuve. Je finis par arriver au contrôle ou je retrouve Vincent qui me prend le vélo pour l'emmener au mécano.
J'en profite pour manger et boire.
Vincent revient à peine 10mns plus tard en me disant que le mécano s'est foutu de sa geule car les citasses passent convenablement.
Je fais un essai et effectivement elles passent bien. C'est à n'y rien comprendre...
Je vais pouvoir repartir mais je sens à ce moment là qu'un ressort s'est cassé dans ma tête et je ne saurais l'expliquer.
Dès lors, mon rythme va baisser, je vais rouler essentiellement seul.
Je n'ai p,us trop de sensations.
Un regret, au contrôle suivant je réparts avec un allemand, nous roulons ensemble une petite heure, on s'entend super bien, je me remets à la langue de Goeth non sans difficulté mais victime d'une méchante crampe et d'un coup de moins bien il me dit de repartir.
On se prend dans les bras en se souhaitant mutuellement de réussir, instant très émouvant.
Tandis que je reprends la route, je vois un cycliste un peu plus loi; et ma vitesse s'affole car je n'ai pas envie de rester seul.
Je lui fait la chasse, finit par revenir sur lui dans une bosse mais je dois m'arreter peu après pour un arrêt pipi mais mon acolyte ne m'attend pas et je ne parviens pas à revenir sur lui. J'ai à ce moment là un coup de moins bien et tente tant bien que mal de gérer.
Les à coups après tant de bornes, ce n'est pas bon.
La deuxième nuit approche et je suis tout seul.
J'arrive à Loudéac au km 750, il est bientôt 22h. J'en ai plein le cul, au sens figuré comme au sens propre. En effet, je peux à peine poser mon séant sur la selle tellement je suis boursouflé. Je me demande comment je vais pouvoir repartir.
En attendant je me ravitaille encore et toujours.
Une petite anecdote qui en dit long sur mon état de fatigue: Au rond point de l'arrivée du contrôle, un bénévole me demande si je vais direction Brest ou Paris. Je réfléchis une bonne trentaine de secondes et après des euh...euh...je finis par lui dire Paris.
Je retrouve Vincent et Khorem et leur dit que j'en ai marre, plus d'envie, je souhaite abandonner. Vincent me dit que ça va passer, qu'il n'y a aucune inquiétude à avoir. Le téléphone sonne à ce moment là, c'est Valérie, elle me dit la même chose. On voit bien que ce ne sont pas eux qui pédalent.
J'enlève mon cuissard, me lave le fessier avec un gant, bon sang je jongle, c'est rien de le dire...une fois à peu près propre, je m'enduis le fessier de cicalfate, crème réparatrice puis j'enfile un cuissard propre. Je troque également mon maillot manche courte par une veste longue car une petite bise fraîche s'est levée et je n'ai pas très chaud. J'enfile également une paire de gants longs.
Je vais tacher de dormir un peu, un dortoir est réservé pour les coureurs. On me dit que c'est payant...Pardon, j'hallucine...Bon c'est combien....8€...Ben ils se font pas chier...1h où 5h c'est le même prix....merde, j'en aurai pas pour mon argent, enfin l'argent de Vincent.
Je prends 1h et on verra après...La cour des miracles le dortoir, ça grogne, ça ronfle, impossible de fermer l'oeil, je me repose quand même.
Ça passe vite 1h quand t'es fatigué, un bénévole vient et un autre cycliste prend ma place.
Je retrouve Vincent et Khorem à la voiture, toujours pas envie de repartir.
Je décide de me reposer encore un peu. Khorem s'endort rapidement et...ronfle...putain de merde...mais au moins là c'est gratuit.
Une nouvelle heure s'écoule.
Je sens que mon fessier va beaucoup mieux, le cicalfate produit son effet et c'est ce qui me donne envie de repartir.
Il est 2h15 du matin quand je reprends le vélo, je suis à nouveau seul et m'enfonce dans la nuit noire éclairé de ma lampe avant pour la deuxième fois depuis mon départ il y'a maintenant plus de 34h.
Je suis euphorique car mon fessier ne me fait pratiquement plus mal et j'ai retrouvé mes jambes. Mais je suis toujours seul.
J'ai posé le cerveau, je pédale machinalement, les bosses se succédant aux bosses avec un peu de plat de temps en temps.
C'est monotone, c'est chiant mais qu'est ce que je fous là...
Il est maintenant sûr que je ne suis pas en sur régime. La moyenne baisse mais lentement et je suis incapable de savoir où j'en suis de mon objectif.
Le jour pointe le bout de son nez et j'alterne les phases de bien et de moins bien.
Encore 20 kms avant d'atteindre le contrôle de Tinténiac. Je sens le sommeil me gagner, j'ai du mal à lutter, il faut que je m'arrete dormir un moment. Je m'éloigne de la route principale, pose le vélo sur le bas coté, enlève tout ce que j'ai dans mes poches, m'allonge en mettant ma casquette sur les yeux pour trouver un peu d'obscurité et essaie de trouver le sommeil...en vain...tant pis, ça fait du repos quand même et je reparts revigorė après cette petite pause d'une trentaine de minutes.
Ça y est, j'arrive à Tinténiac, km 935, je retrouve mes deux fidèles accompagnateurs mais ça ne va pas fort car je suis écoeuré, rien envie de manger, juste envie de vomir. Khorem me propose une compote, la seule chose qui me fait plaisir. J'en prends même une seconde.
Je reparts après bien 45mns d'arrêts, seul, pour changer. Avec encore et toujours des bosses...
J'arrive au km 962 et j'appelle Vincent pour lui dire que je jette cette fois çi définitivement l'éponge...ite missa est...
Fin de l'aventure,
Stef
.
Oups tremplin 😭
Bravo Stef, tu as encore beaucoup d'années pour réussir le PBP, sans aucun doute. Cette première expérience te servira de tramplin pour boucler la deuxième.
un truc de dingue. J'en ai mal rien qu'a lire ton résumé. Impressionnant . Bravo et ne t'inquietes pas cette epreuve te rendra encore plus fort. Tu es encore jeune. RDV dans 4 ans pour l'accomplissement et la réussite.
962 kms faut le faire 👍
C'est inumhain je ne sais pas qui a inventé des trucs pareils ??
Félicitations
Salut Stef, ce n'est pas une défaite, nous sommes des humains et non des machines. Seul le corps commande et se met en mode sécurité, c'est le signal qu'il faut respecter malgres soit. Soit fier et ce n'est que partie remise. Thierry